Ce n’est pas les mains vides mais avec « de bonnes nouvelles » que Marisol Touraine est venu présenter son projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Sourire en coin, la ministre des Affaires sociales s’est félicitée du niveau historiquement bas des dépenses, affirmant que « c’est le meilleur et le plus beau démenti aux discours répétant que la France ne peut plus assumer son modèle social ». Narguant presque les mauvaises langues, elle vise même un déficit « sous la barre symbolique des 10 milliards d’euros » en 2016, soit 3 milliards de moins qu’en 2015. Ajoutant que « depuis 2012, le déficit a été réduit de 40% ». Un chiffre fort que Marisol Touraine veut aussi rassurant pour les esprits tourmentés, garantissant que « les retraites seront assurées grâce au rétablissement de la Sécurité sociale ». À l’en croire, pour la première fois depuis 2004, la branche vieillesse du régime général serait même en « léger excédent ». Quant aux Français, ils partiraient de plus en plus tard à la retraite : 60,5 ans en 2010 contre 61,2 en 2013, avec une prévision de 64 ans en 2030.
« Des efforts sont demandés, ils portent des résultats »
Alors que la Sécurité sociale fête cette année ses 70 ans, ces nouvelles sont-elles trop « bonnes » pour être vraies ? Si Christian Eckert, le secrétaire d’État chargé du Budget, affirme que « le retour à l’équilibre est désormais proche », il n’en reste pas moins que les comptes de la « Sécu » restent toujours dans le rouge. La question mérite d’autant plus d’être posée que la Cour des Comptes a annoncé, pas plus tard que le 15 septembre dernier, que la pérennité de la branche maladie était bel et bien menacée par « la persistance de ses déficits, le gonflement de la dette sociale qui en résulte, l’érosion de la protection qu’elle assure ». Pour retrouver le niveau d’avant la crise, l’objectif serait de passer à un déficit de « 9,7 milliards d’euros en 2016 » d’après Christian Eckert. Quant au FSV, le Fonds solidarité vieillesse, il devrait commencer à diminuer en 2016.
Après les fameuses « nouvelles », place aux mesures. Lors de sa conférence, Marisol Touraine a articulé son projet de loi de financement autour de « quatre axes structurants » de maîtrise des dépenses : la « lutte contre les actes inutiles et redondants », le développement des génériques, l’efficience des dépenses hospitalières et le « virage ambulatoire ». Autre chantier, la mise en place d’une protection universelle maladie qui devrait ouvrir les droits à la prise en charge des frais de soins à tous ceux qui résident de manière stable et régulière sur le territoire français, avec la suppression progressive du statut d’ayant-droit. Autrement dit, tous les adultes deviendront des assurés à part entière. Par ailleurs, l’année 2016 sera marquée par l’entrée en vigueur de la loi d’adaptation de la société au vieillissement, au côté de projets comme la garantie de l’accès des salariés précaires et des retraités à une couverture complémentaire santé moins chère. Côté mineurs, la gratuité de la contraception sera étendue aux consultations et analyses qui lui sont liées. De quoi rassurer, quelque peu, une jeunesse déjà angoissée face à l’avenir de sa propre retraite. Quoi qu’il advienne, Marisol Touraine veut rester fidèle à sa ligne de conduite : « pas un euro n’a été économisé sur le dos des Français ».