ONG de solidarité à l’échelle mondiale depuis 1982, Handicap International (HI) s’engage aux côtés des plus vulnérables en contexte d’urgence comme de développement post-crise. Que ce soit dans les situations de pauvreté, d’exclusion, de conflits et de catastrophes, elle apporte son soutien à celles et ceux qui souhaitent continuer à « vivre debout ».
Un entretien avec Pauline Restoux, présidente de Handicap International.
- Depuis 1982, HI agit à travers le monde aux côtés des personnes handicapées et des populations vulnérables, en contexte d’urgence comme de développement, dans les situations de pauvreté, d’exclusion, de conflits et de catastrophes. Pourriez-vous en dire plus sur vos missions ?
Entre les conflits armés, les accidents de la route mais aussi d’autres situations invalidantes, la société actuelle ne manque pas de « sources de production du handicap ». A ce titre, HI intervient à la fois en matière d’extrême urgence comme de développement sur les territoires les plus impactés. Notre ambition : aider les personnes à « vivre debout ». Cela passe notamment par le retour à l’école et l’emploi, la socialisation, ou simplement par le fait de retrouver une situation personnelle et des amis.
Aider les plus vulnérables parmi les vulnérables est la raison d’être de notre entité, toujours prête à se rendre « là où personne d’autre ne va ». En ce sens, elle intervient sur les deux fronts que sont les situations d’urgence comme de développement, toujours en adaptant ses interventions aux réalités du terrain.
- Pour un monde solidaire et inclusif, faire grandir l’engagement citoyen est au cœur des valeurs de votre organisation. Quels outils vous permettent aujourd’hui de sensibiliser le grand public aux enjeux du handicap ?
En France, les associations de personnes sensibilisant la société civile aux enjeux du handicap sont nombreuses ; si leur rôle est fondamental, notre entité intervient davantage à l’inteernational à l’heure où les conflits armés et le repli sur soi n’ont jamais été autant d’actualité. Ouvrir le regard et transformer chaque citoyen en acteur d’une prise de conscience collective fait intégralement partie de l’ADN de HI.
Événement de mobilisation citoyenne, les Pyramides de chaussures invitent les citoyens, politiques et médias à se mobiliser contre le retour des mines antipersonnel sur les zones de combat et dans les arsenaux militaires. C’est aussi l’occasion d’en savoir davantage sur l’association, ses métiers et ses actions, et de faire résonner ses combats en rencontrant ses donateurs, un moment très important.

- Qu’en est-il du côté des initiatives menées par vos bénévoles ?
Mes liens avec Handicap International ont été multiples en trente ans d’expérience : c’est pourquoi il me semble important de mettre aujourd’hui en avant l’action déployée par nos bénévoles, qui est porteuse d’une énergie indispensable à nos actions sur le terrain.
En tant que présidente, je pense notamment aux administrateurs bénévoles dans le cadre de l’organisation d’évènements. Ils ont déjà pour la plupart leur propre activité en parallèle et donnent de leur temps pour faire grandir l’association, malgré un planning déjà bien chargé.
Sans oublier d’autres types de bénévolat qui sont également à saluer, comme l’action des agences de communication et des organes de presse qui nous proposent de bénéficier d’un espace de communication à titre gracieux. C’est un moteur tout aussi important que l’argent qui témoigne de l’engagement de la société civile, bien loin des idées reçues la présentant comme nombriliste et délétère.
- Quel regard portez-vous sur les évolutions engagées depuis la loi Handicap de 2005, notamment en termes d’accessibilité ?
Je pense qu’il faut rester lucide tout en reconnaissant les avancées réalisées. Cette loi a clairement marqué un changement de paradigme, ne serait-ce qu’avec le virage sémantique d’ « handicapé » à « en situation de handicap », qui déplace la responsabilité de la personne sur l’environnement et l’accessibilité. Notre mission chez HI consiste justement à travailler sur ces champs-là en situation de conflits pour repenser l’aménagement dans son ensemble une fois la crise passée et préserver la dignité de la personne quoi qu’il arrive.
Penser l’accessibilité universelle du point de vue de l’ensemble des publics.
- De quelles marges de progression la France dispose-t-elle ? A quels principaux défis notre société sera-t-elle prochainement confrontée ?
Penser l’accessibilité universelle du point de vue de l’ensemble des publics n’est pas encore une réalité en France et l’exemple du logement l’illustre parfaitement. Aujourd’hui, 1,2 million de personnes rencontrent d’importants problèmes d’accessibilité dans leur habitat comme l’avait indiqué la sénatrice Martine Berthet lors d’un colloque. Si nous disposons déjà des outils législatifs et de l’expertise nécessaires, il manque encore de la volonté politique pour prendre en France la mesure de l’impact que la limitation peut avoir en termes d’accessibilité sur nos vies.
- En tant qu’ONG internationale, vous possédez un point de vue comparatif entre pays. Comment situeriez-vous la France en matière d’accessibilité et de politique en faveur du handicap ?
La France accuse encore un retard entre protection sociale et accessibilité à l’emploi/autres lieux publics, contrairement à d’autres pays comme la Suède et la Norvège qui sont très en avance sur la question. En ce sens, je pense que nous avons une carte à jouer en trouvant l’équilibre entre nos prétentions de pays « pionnier » et la réalité des faits.