Vous avez affirmé en avril en avril dernier, lors d’une interview accordée aux Echos, vouloir “transformer Radio France”. Quelles seront les principales étapes de cette transformation ?
Je souhaite effectivement impulser très vite les changements qui vont permettre de transformer Radio France. Les directeurs des chaînes sont maintenant tous nommés et prêts à amorcer cette métamorphose, en travaillant sur la consolidation et la conquête d’audience dans un univers de concurrence en constante mutation du fait, notamment, du développement du numérique. Je m’étais engagé auprès du CSA à féminiser les équipes. Il y a maintenant trois femmes parmi les sept directeurs d’antennes de Radio France.
“France Inter est leader sur tous les moments clés de l’information.”
En termes de contenus, j’ai à coeur de réaffirmer l’identité des sept chaînes qui doivent être complémentaires pour toucher le public le plus large. Je souhaite par exemple que France Info renoue avec l’actualité “chaude” ou que Le Mouv’ parvienne à attirer le public des cultures urbaines. Cela doit aller de pair avec une déclinaison des contenus sur tous les canaux de distribution, qu’il s’agisse des bandes FM, d’Internet, des applications mobiles ou des réseaux sociaux, afin d’améliorer leur visibilité et leur référencement.
Vous l’avez compris, les défis de l’audience sont au cœur de ma stratégie. Il s’agit de faire de Radio France une entreprise d’excellence sur ses métiers : l’offre de contenus, et sur sa mission : l’accès à tous les publics.
France Culture et France Musique constituent des exceptions culturelles très françaises, puisqu’elles sont à la fois peu écoutées et très appréciées de leurs auditeurs passionnés. Pensez-vous que cet heureux paradoxe puisse se maintenir longtemps dans un paysage audiovisuel de plus en plus commercial ?
Cet heureux paradoxe a pour nom le service public. Il n’est pas question de remettre en cause cette exigence culturelle qui fait la qualité des chaînes de Radio France. Cela dit, il est vrai que France Musique doit conquérir un auditoire plus large en adaptant sa programmation pour laisser davantage de place à la musique. Quant à France Culture, ses résultats d’audience sont très honorables et ses podcasts connaissent un vrai succès. L’enjeu est de poursuivre ce développement grâce aux talents des antennes et à une synergie toujours plus importante avec les nouveaux médias.
Radio France, ce sont aussi des orchestres et un choeur, ce que le grand public oublie parfois. Pouvez-vous nous expliquer comment comptez-vous maintenir ce rôle “mécène” de l’activité musicale de notre pays ?
Avec ses quatre formations musicales (Orchestre National de France, Orchestre Philharmonique de Radio France, Choeur et Maîtrise de Radio France), Radio France joue un rôle majeur dans la création, la production et la diffusion de la musique. Nous disposons là d’une richesse considérable qu’il nous faut préserver et développer. Pour cela, il me semble indispensable de redéfinir les missions respectives des deux orchestres et de rénover notre offre de concerts en proposant à la fois des formes plus variées (formats courts, horaires décalés) et une programmation diversifiée avec des oeuvres à la croisée de différents styles musicaux.
“Les défis de l’audience sont au coeur de ma stratégie.”
La Fondation “Musique et Radio”, abritée par l’Institut de France, permettra de financer un certain nombre de ces projets, ainsi que la pédagogie et la création, au coeur des missions de nos formations musicales.
Que pensez-vous du positionnement de France Inter par rapport à ses concurrentes RTL, Europe 1 et RMC ?
La ligne éditoriale de France Inter répond aux exigences du service public en matière d’information, à savoir : qualité, exigence du pluralisme, exhaustivité, indépendance. Cela lui réussit plutôt bien. Il ne faut pas oublier que France Inter est leader sur tous les moments clefs d’information de la journée, le matin, à la mi-journée et le soir.
Estimez-vous que la complémentarité des chaines de radio avec les outils numériques est satisfaisante aujourd’hui ? Le réseau France Bleu, très impliqué sur les territoires, est-il susceptible de connaître des bouleversements en cas d’accélération de la réforme des régions, éventuellement en concertation avec les élus ?
Tout d’abord, je souhaite rappeler que le numérique est une formidable opportunité de développement pour la radio et que c’est un des axes principaux de mon projet pour Radio France. L’avenir de la radio passe par son enrichissement en vidéos et en infographies, qui doivent accompagner l’écoute sans la transformer en télévision. Il s’agit là d’une complémentarité amenée à évoluer au fur et à mesure des avancées techniques. À ce titre, les nouveaux studios de France Inter et France Info vont nous aider à développer les synergies. L’enjeu du numérique est aussi de rendre les programmes accessibles au plus grand nombre. Toutefois, n’oublions pas que la radio bénéficie d’avantages décisifs par rapport aux autres médias : elle est par nature un média de mobilité et historiquement le premier média interactif.
Conformément au Cahier des Missions et de Charges de Radio France, le réseau France Bleu est un média de proximité dont la vocation est d’assurer un maillage serré du territoire national, maillage qui peut encore être amélioré. En cas de réforme des régions, il faudra penser son organisation afin qu’il continue d’être au plus près du quotidien de ses auditeurs.
L’un des chantiers porte sur la “maison ronde” : cet immeuble, qui fait partie du paysage parisien a été fermé pendant plusieurs années. Est-ce que les travaux sont aujourd’hui terminés et les aménagements pourront-ils suffire à abriter l’ensemble des services ?
Il s’agit en effet d’un chantier considérable. La toute fin des travaux est prévue pour 2017, mais nous allons connaître une étape décisive d’ici à la fin de l’année avec la réouverture au public du bâtiment de la Maison de la radio. On pourra notamment découvrir le studio 104 (de 856 places) entièrement rénové et un auditorium flambant neuf de 1461 places. Ces équipements, accompagnés d’un programme culturel d’envergure, nous permettront de faire connaître nos métiers au plus grand nombre et de faire de cette maison un point de repère incontournable de la production, de la diffusion et de la création culturelles.
Propos recueillis par Pauline Pouzankov