“Nourrir c’est aimer” insiste Edouard Chaulet, maire de Barjac, petite commune du Gard. Devant la caméra, l’édile est calme et annonce, comme si cela était abscons de nos jours, qu’il est tout aussi primordial de bien traiter notre terre que de nourrir qualitativement nos enfants.
Le sujet est dès lors planté : comment faire pour vivre sans produits chimiques dangereux pour notre organisme ? C’est la question que soulève Guillaume Bodin dans son dernier documentaire. Pour lui, il est urgent de remettre en question nos méthodes agricoles, qui produisent bien plus qu’il n’en faut pour nourrir tout le monde à sa faim. Du moins en théorie. Seulement, l’Occident a été pris d’un accès de fièvre chimique à la sortie du dernier conflit mondial, conséquence directe des souvenirs de privations sévères dues à la durée des hostilités. Depuis, rien n’a vraiment changé, ou presque ; nous avons (re)découvert les bienfaits de l’agriculture biologique et dénuée de pesticides, substances dont on sait qu’elles peuvent provoquer cancers et autres joyeusetés, telle la maladie de Parkinson.
Des chiffres, un constat
Des chiffres, il y en a un petit peu quand même et il sont bon à retenir. 54 milliards d’euros : c’est la somme d’argent dépensée chaque année en France afin de traiter notre eau et la rendre potable en la débarrassant d’un maximum de pesticides. 220 : c’est le nombre des produits nocifs présents dans 70% de des nappes phréatiques françaises.
Le constat de Guillaume Bodin est sans appel : il faut débarrasser notre agriculture des produits phytosanitaires les plus dangereux. Et ce, le plus vite possible, plutôt que d’attendre de constater encore un peu plus leurs effets néfastes sur notre croissance et notre santé. Une sonnette d’alarme qui n’entache pas pour autant l’optimisme du cinéaste.
Alors que près de 10% de notre agriculture est aujourd’hui certifiée “bio” – donc sans produits phytosanitaires – les opportunités sont grandes pour élargir ce nouveau mode de production et de consommation. A commencer par les circuits d’approvisionnement courts, qui remettent le paysan et l’éleveur au centre des échanges, court-circuitant ainsi les intermédiaires qui réalisent leurs marges au détriment des exploitants sans voir la couleur de la terre, ni son état.
Un avenir et un goût meilleurs
Cela permet également de se sustenter mieux et pour un prix équivalent, si ce n’est moins cher dans beaucoup de cas. La qualité gustative de nos aliments – qui n’a d’ailleurs pas à être écartée, mais c’est un autre sujet – s’en trouvera grandement améliorée à l’heure du tout surgelé.
Les exemples cités par l’équipe de Guillaume Bodin sont très illustratifs et démontrent qu’une autre alimentation est possible sans retour à l’âge de pierre. Citons notamment les efforts réalisés en Bretagne : le réseau Bruded, ceux de la commune de Laurenan, les cantines bio de Langoët , etc.
Selon le documentaire, la clé de cette évolution d’ordre sanitaire est l’information : connaître le contenu de nos assiettes permet ensuite d’explorer des alternatives moins médiatisées. Regarder Zéro Phyto, 100% Bio pourrait être un premier pas en ce sens …
Certaines villes sont déjà entièrement labellisées “bio” dans leur manière de traiter leur biodiversité et l’eau, à commencer par Grande-Synthe (Nord), Versailles (Yvelines) ou encore Barjac (Gard), déjà citée en début d’article. Le documentaire se termine toutefois par une mise en garde de la progression de l’urbanisation au détriment de la sauvegarde de nos terres cultivables saines (dans le documentaire on apprend que “l’équivalent de 100.000 stades de football sont construits chaque année dans notre pays”). Une manière de dire que mieux se nourrir passe aussi par l’attention que l’on porte à la gestion efficace de l’équilibre territorial.