Si la députée européenne EELV Michèle Rivasi se réjouit de la mise en place du nouvel étiquetage alimentaire dans les supermarchés, la balle reste encore dans le camp du consommateur et des institutions européennes pour en assurer l’efficience.
Les industriels pourront désormais apposer le logo Nutri-score pour aider le consommateur à choisir des produits plus sains. Toutefois, le fait qu’il ne soit pas obligatoire ne risque-t-il pas de conduire à l’inefficacité de ce système ?
C’est effectivement un risque. Pour cette raison, nous avons lancé une pétition sur le site change.org afin de mobiliser les consommateurs et demander à ce que les industriels utilisent bien le label Nutri-score, comme ils s’y étaient engagés. Maintenant, vont-ils tenir parole ? D’autant plus qu’il suffirait que certains d’entre eux jouent le jeu pour que les autres suivent, ce qui permettrait de créer un cercle vertueux incitant à fabriquer des produits avec une meilleure qualité nutritionnelle.
Une initiative citoyenne a également été lancée en parallèle : j’espère qu’elle parviendra à récolter plus d’un million de signatures d’ici la fin de l’année pour montrer la mobilisation des consommateurs en faveur de ce type de label.
Le poids de la France est très important dans le choix de l’étiquetage, tout comme l’est celui des consommateurs.
L’annonce d’un logo simplifié a longtemps suscité la défiance des industriels, parmi lesquels certains souhaitent développer leur propre étiquetage. Cette multiplication de signes va-t-elle créer une cacophonie et perdre le consommateur ?
C’est même certain. La ministre de la Santé doit en ce sens maintenir qu’elle ne souhaite voir qu’un seul et même logo tout en jouant sur le plan européen pour le faire appliquer dans l’ensemble des pays membres. D’autant plus que poids de la France est très important dans le choix de l’étiquetage, tout comme l’est celui des consommateurs.
Le changement d’étiquetage n’est pas un chantier nouveau : comment les industriels ont-ils joué la montre ?
Les industriels ont repoussé l’échéance en proposant leur propre étiquetage, avec un calcul nutritionnel sur des portions très faibles (30 grammes) pour ne pas rentrer dans le rouge. Leur argument ? Que le logo Nutri-score allait stigmatiser certaines enseignes. Ce qui est faux puisque sur une même gamme de cassoulet ou de céréales la couleur attribuée varie d’une marque à l’autre, en fonction de la quantité utilisée de gras ou de sel par exemple. En réalité, les industriels ne veulent pas accentuer la concurrence encore davantage : or l’étiquetage sert justement à aider le consommateur à faire un choix éclairé.
Le consommateur n’imagine pas à quel point le choix des produits est un pouvoir politique à lui seul !
Comment le consommateur peut-il agir à son échelle pour faire entendre sa voix ?
Le consommateur n’imagine pas à quel point le choix des produits est un pouvoir politique à lui seul ! Si l’on boycotte les industriels qui n’appliquent pas l’étiquetage Nutri-score, ces derniers finiront bien par l’adopter. J’appelle également les citoyens à signer notre pétition sur change.org en faveur d’un caractère obligatoire pour le codage à cinq couleurs.
Les autorités européennes peuvent-elles s’emparer du sujet pour imposer un seul et même étiquetage dans la zone de l’UE ?
Je suis justement en pleine réflexion sur la manière dont la directive sur l’étiquetage pourrait être révisée à la Commission européenne pour l’harmoniser à l’ensemble des pays. On nous l’a refusée en 2010 à seulement quelques voix, en raison du poids du lobby agro-alimentaire qui affirmait que le logo tricolore allait amener la fermeture de certaines sociétés. Le Nutri-score est en ce sens une petite victoire qui sera concrétisée uniquement si le consommateur joue le jeu en favorisant les entreprises qui utilisent ce label.
Qu’est ce que le logo Nutri-score ?
Prévu dans la loi Santé, ce nouveau logo nutritionnel adopte un code couleur selon la qualité des aliments, allant de la meilleure note en vert (A) à la moins bonne, en orange foncé (E). Le but ? Rendre l’information nutritionnelle de l’étiquetage plus lisible et ainsi inciter les consommateurs à acheter des produits plus sains, notamment pour lutter contre l’obésité et le surpoids. Pour le choisir, quatre pictogrammes ont été testés pendant dix semaines dans 60 supermarchés en condition réelle d’achat. Résultat : c’est avec le Nutri-score que la qualité du panier moyen avait le plus augmenté. La ministre de la Santé Marisol Touraine avait même affirmé : « Pour la première fois, l’intérêt de l’étiquetage nutritionnel est démontré ».