Êtes-vous favorable à la réforme du mode de scrutin proposé par le gouvernement ?
Jacques Pélissard : Le mode de scrutin des cantonales, qui instaure un binôme homme/femme sur des cantons redécoupés, me paraît impraticable. Deux élus sur un même territoire, cela débouchera forcément sur des difficultés supplémentaires sur le terrain, des distorsions voire des oppositions entre eux. Quant à la réforme du mode de scrutin aux municipales, dont le principe a été posé par la loi du 16 décembre 2010, elle veut abaisser le scrutin de liste qui est aujourd’hui réservé aux communes de plus 3 500 habitants. L’AMF avait proposé un seuil à 1 000, l’Assemblée nationale a décidé de le descendre à 500. Personnellement, je souhaite qu’il remonte à 1 000 au moins.
En quoi était-il nécessaire de désigner les élus communautaires au suffrage direct ?
Jacques Pélissard : Je suis favorable à une injection d’une dose de suffrage universel direct pour les élus communautaires. Le système de fléchage des futurs délégués doit être simple et lisible afin de permettre de mieux faire comprendre la démarche et, surtout, les enjeux de l’intercommunalité.
Michel Destot : La réforme du mode de scrutin des conseillers communautaires nous paraît essentielle notamment pour les grandes intercommunalités. En effet, celles-ci voient leurs compétences s’accroître alors qu’elles échappent à tout contrôle démocratique direct. Les membres de ces instances sont des délégués des conseils municipaux, cooptés selon des modes de calcul très éloignés des réalités démographiques des communes. Ces délégués élisent des présidents qui ne doivent pas toujours leur mandat à la présentation d’un projet intercommunal mais bien souvent à la satisfaction des intérêts communaux. Comme on le sait malheureusement la somme des intérêts particuliers ne fonde pas toujours l’intérêt général. Le saupoudrage s’ajoute ainsi souvent au manque de transparence. La rigueur financière et l’exigence démocratique n’y trouvent pas forcément leur compte. Pour les élections municipales de 2014 et compte tenu de la proximité du scrutin, le législateur devrait retenir le principe du fléchage pour indiquer sur les listes municipales les conseillers qui siègeront dans les instances intercommunales en cas de succès. C’est un premier pas. Prenons garde qu’il ne soit cependant pas le dernier. Il paraît donc nécessaire et opportun d’inscrire dès aujourd’hui dans la loi le principe et la date de l’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires.
Quelles sont les conséquences de l’abaissement du seuil démographique appliqué pour le scrutin de liste ?
Jacques Pélissard : Environ 6 550 communes en France seraient concernées par l’abaissement du seuil à 1 000 habitants pour le scrutin de liste. Les conséquences seront de deux ordres. Tout d’abord une amélioration de la parité au sein des conseils municipaux des petites communes, avec près de 16 000 conseillères supplémentaires. Puis ensuite une représentation effective de l’opposition.
Michel Destot : L’abaissement du seuil démographique pour le scrutin de liste lors des prochaines élections municipales de 2014 permettra, tout d’abord, l’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires dans les 16 600 communes qui comptent au moins 500 habitants, selon le texte du projet de loi adopté en première lecture le 26 février à l’Assemblée nationale. Dans ces mêmes communes cela permettra, avec le scrutin de liste, de respecter le principe, constitutionnel, de parité et donc à davantage de femmes de siéger dans les conseils municipaux, ainsi que dans les conseils intercommunaux, de l’ordre de 32 000 conseillères municipales supplémentaires (à ce stade des débats), portant leur nombre total à 103 000 élues en 2014 contre 71 000 aujourd’hui. Précisons que la commission des lois du Sénat vient, au terme de ses travaux, d’adopter un texte dans lequel elle revient au seuil de 1 000 habitants proposé par le gouvernement. Des évolutions sont encore possibles lors de l’examen du projet de loi. Rappelons aussi que l’Assemblée nationale a étendu à toutes les communes, quelle que soit leur taille, l’obligation d’une déclaration préalable des candidatures à la préfecture ou à la sous-préfecture.