Par manque de culture ou de goût pour la vie parlementaire, beaucoup de commentateurs, dimanche soir après le deuxième tour et lundi matin, avaient l’air obsédés par la question de savoir qui serait Premier ministre dans l’attente de quelque oracle susceptible de venir de l’Elysée… Moeurs d’hier ! C’est méconnaître l’existence d’une échéance précise et certaine, puisque fixée par la Constitution en son article : l’élection du président de l’Assemblée nationale, le 18 juillet. Qu’il y ait ou non un ou une Premier ministre et quel (le) que soit celle-ci ou celui-ci, rien ne peut fonctionner dans ce pays sans une chambre des députés dotée d’un président, de groupes constitués ainsi que de commissions composées à la proportionnelle et en vertu de certaines coutumes, la plus récente étant de confier par exemple la présidence de celle des finances à un élu d’opposition. Mais qu’est-ce que l’’opposition quand il n’y a pas de majorité ? Réponse le jeudi 18 !
Les tractations en vue de former un gouvernement peuvent attendre, en revanche, comme c’est d’ailleurs souvent le cas après les élections chez plusieurs de nos voisins européens. L’interrogation la plus immédiate est donc de savoir quelle personnalité s’installera au perchoir. Sujet terriblement intéressant voire même passionnant. D’une entente parlementaire autour d’un telle fonction peut découler la martingale permettant le fonctionnement d’un hémicycle à trois pôles. Encore faut-il que l’impétrant soit à la fois sage et expérimenté et que son indispensable habileté ne soit pas récusable par les extrêmes sur un motif ou un autre. L’une des particularités de l’emploi tient en effet dans la prérogative consistant à jouer le rôle de garant de l’expression des élus minoritaires. Autrement dit, tout le monde dans une Assemblée sans vraie majorité et autant ajouter qu’il faudra donc trouver une sorte de mouton à cinq pattes. Difficile de dire, dans l’immédiat, si un profil correspondant à la « fiche de poste » existe chez les élus ou réélus d’après la dissolution.
Une chose est sûre, cependant : il faudra bien trouver quelqu’une ou quelqu’un pour présider et incarner, de ce fait, le coeur de la représentation nationale. Gabriel Attal a parlé d’or lorsqu’il a expliqué en substance que le Palais Bourbon allait redevenir le coeur de la vie publique. C’est la raison pour laquelle, avant même de quitter physiquement l’hôtel de Matignon, il lorgne déjà sur la présidence du groupe Renaissance. Quant aux Républicains non « Ciottistes », leur petit nombre en pupitres ne les empêchera nullement d’exploiter à fond leurs liens avec leurs collègues du Sénat plus assurés en nombre et dans la durée. De beaux jours s’annoncent pour le Parlement en son ensemble si l’on veut bien considérer le verre à moitié plein. Sans même exister sur le papier, le fameux « groupe central » équidistant des extrêmes ne semble-t-il pas dès maintenant avoir adopté la loi non écrite de l’équipe de France dans l’Euro : gagner sans marquer !