Faire de l’égalité femme-homme une réalité pour l’ensemble des avocates : c’est l’une des grandes ambitions de Marie-Aimée Peyron, qui est seulement la troisième femme parmi les 220 personnalités à s’être succédé au poste prestigieux de bâtonnier de l’ordre des avocats de Paris.
Vous avez affirmé vouloir faire de l’égalité « l’une des grandes causes » de votre mandat. Quel regard portez-vous sur la situation actuelle au sein de votre profession ?
C’est effectivement l’un des principes essentiels que nous portons au sein de ce bâtonnat avec mon vice-bâtonnier Basile Ader. Celle-ci provient d’un simple constat : aujourd’hui, sur les 30 000 avocats parisiens, 54 % sont des femmes. Or elles perçoivent en moyenne 51% de rémunération en moins que les hommes ! De plus, ces avocates sont près de 60 % à être collaboratrices ; seules 20 % sont associées et le plus souvent de cabinets dits de droits des personnes. Celles qui travaillent dans des départements de banques ou de finances ne représentent quant à elles que 4% de la profession. Notre objectif vise donc à briser ce fameux plafond de verre tout en s’engageant à combattre toute forme d’harcèlement.
C’est pourquoi nous avons mis au point un plan d’actions reposant à la fois sur la sanction comme l’incitation. Ainsi a été intégré au sein du règlement intérieur du barreau de Paris (RIBP) le principe d’égalité et de non-discrimination comme la notion d’agissements sexistes, constitutifs d’un manquement. En parallèle, un manifeste d’égalité a été rédigé à destination des cabinets d’avocats pour les inciter à le signer puis l’adopter.
A cet effet nous avons également lancé les premières Assises de l’égalité avec des tables-rondes sur toute une journée pour exposer comment ce principe pourrait être appliqué au sein des cabinets. Sans oublier les Trophées de l’égalité qui ont récompensé dans trois catégories ceux qui ont mis en place une politique allant dans ce sens.
Aujourd’hui, sur les 30 000 avocats parisiens, 54 % sont des femmes.
De quelles avancées êtes-vous la plus satisfaite depuis votre prise de fonctions ?
Tout d’abord d’être parvenus à mettre en place l’ensemble de ces actions à Paris pour ensuite les faire adopter au sein du règlement national. C’est une véritable satisfaction d’avoir pu travailler tous ensemble et de constater l’ampleur du retentissement ! Car si les plus grands cabinets d’avocats prennent davantage de mesures en ce sens, les moyennes structures ont pour la plupart encore besoin de pédagogie pour être sensibilisées à l’égalité. J’ai néanmoins le sentiment que la vague est en route et que ces démarches volontaires entameront très prochainement des actions irréversibles !
Avez-vous personnellement fait face à des situations d’inégalité lors de vos précédentes expériences ?
Personnellement, je me suis toujours battue de façon à être considérée à égalité avec mes confrères. Les avocates ne doivent pas se laisser discriminer car il leur appartient aussi d’oser ! En ce sens, des évolutions restent à faire pour que les femmes qui sont tout aussi compétentes que les hommes accèdent au même poste et aux mêmes responsabilités.
Quel premier bilan pourriez-vous dresser de votre mandat ?
Je suis fière des réalisations que nous sommes parvenus à mettre en place avec mon vice-bâtonnier et qui doivent être absolument poursuivies. Nous luttons également pour le droit des femmes et contre les violences faites aux femmes, notamment avec la création du dispositif « Bus Barreau de Paris Solidarité » proposant des consultations gratuites et un programme 365 pour ces femmes victimes de violence. Je tiens d’ailleurs à saluer le travail des 110 avocats qui se sont portés bénévoles pour assurer le suivi des dossiers !
En tant que troisième femme bâtonnier de Paris sur 220, je n’espère qu’une seule chose : qu’une femme succède à une autre sans que cela ne soit plus un évènement !
Je me suis toujours battue de façon à être considérée à égalité avec mes confrères.
Quels autres enjeux souhaiteriez-vous mettre en exergue d’ici janvier 2020 ?
La réduction de l’écart de revenus, la conciliation entre la vie professionnelle et personnelle, le partage du pouvoir, sans oublier la formation de nos élèves avocats sont autant d’enjeux dont nous nous sommes également saisis. J’ai d’ailleurs été ravie que le défenseur des droits Jacques Toubon accepte d’être le parrain de la promotion 2018/2019 de l’Ecole de Formation du Barreau !