Plus de trois millions de chômeurs. Plus qu’un constat alarmant, c’est la première fois que ce seuil symbolique est franchi en France, depuis 1999. Si le ministre du Travail Michel Sapin avait déjà accusé l’été dernier « l’échec des politiques économiques et sociales menées au cours de ces dernières années » d’être la cause essentielle de l’inactivité, cela ne suffit pas à remonter le moral des troupes sur le front du travail en ce début 2013.
Une bataille perdue d’avance ?
Une fois de plus, « le cap est fixé » pour François Hollande. Car le gouvernement a fait de l’emploi la première des batailles, établissant un calendrier de réformes pour sortir de la crise « plus vite et plus fort ». Mais rien n’est moins sûr, à en croire les prévisions de l’Insee qui annoncent une croissance de seulement 0,1 % pour les deux premiers trimestres de 2013, alors qu’elle devrait atteindre au moins 1,5 % pour créer des emplois pérennes d’après l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Autrement dit, le chômage ne serait pas prêt de baisser et continuerait même son ascension pour atteindre les 10,9 % à la moitié de l’année, contre les 10,3 % actuels. Un coup dur, d’autant plus que l’effort de rigueur budgétaire historique laisse peu de chances à une éventuelle reprise en 2013.
À défaut de l’inverser, deux mesures phares du gouvernement pourraient néanmoins contenir la hausse ininterrompue du chômage depuis mai 2011. Près de 150 000 emplois d’avenir seront ainsi créés pour les personnes en difficulté d’insertion d’ici 2014. Le tout pour un coût d’environ 1,5 milliards d’euros par an. L’exécutif table par ailleurs sur la signature de 100 000 contrats de génération chaque année, et ce tout au long du quinquennat. Coût total : 2,5 milliards d’euros. Un moyen de « lier l’expérience du senior avec l’espérance du jeune », selon François Hollande, qui souhaite par ailleurs réformer la formation professionnelle « pour accompagner prioritairement les chômeurs vers l’activité ». Ces deux projets génèrent beaucoup d’attente, mais il reste encore à savoir combien de postes concrets et viables ils seront en mesure de créer. L’éventualité d’une déception serait alors d’autant plus douloureuse que les investissements financiers déployés sont lourds.
Réformer le marché du travail
Au-delà des réformes structurelles, c’est dans le « compromis social historique », échoué à la fin de l’année dernière, que François Hollande place son espoir pour relancer l’emploi. Le gouvernement compte sur les partenaires sociaux pour concilier plus de souplesse pour les entreprises et plus de protection pour les salariés. Mais ces derniers n’ont pour le moment pas été très efficaces. La faute au patronat qui ne veut pas entendre parler de la taxation des contrats courts promise par le candidat Hollande. D’où l’avertissement du président : « N’attendez pas que la loi fasse ce que les partenaires eux-mêmes n’auraient pas convenu ».
Car l’enjeu est de taille : si les emplois d’avenir et les contrats de génération sont une réponse d’urgence, le « compromis » souhaité par l’Élysée doit produire des effets sur le long terme. Quand bien même MEDEF et syndicats parviendraient-ils à trouver un terrain d’entente, les retombées économiques – et électorales – ne seront pas immédiates. En attendant, François Hollande demeure rassembleur et confiant en l’avenir. « 2012 a été l’année où ensemble nous avons engagé le redressement. 2013 sera l’année de la mobilisation de tous pour le réussir ».
Le quinquennat de Nicolas Sarkozy a montré que les premiers mois sont décisifs dans la perspective d’une réélection. François Hollande le sait. C’est pourquoi il veille tant à planter les graines de la croissance de demain, pour être celui qui en récoltera les fruits en 2017.