La politique impose-t-elle de porter un tailleur ou un costard ? Théoriquement non. À l’Élysée, aucune tenue n’est imposée aux ministres. Au Sénat ou à l’Assemblée nationale non plus, mais vous ne verrez pas pour autant un parlementaire en chemise hawaïenne, short et tongs, siroter un Coca Zéro sur les bancs de l’hémicycle. Le poids de la tradition demeure, tant est si bien que les huissiers lui refuseraient l’accès à la salle. Tout au plus apercevrez-vous un ministre en col Mao (Jack Lang) ou un député en costume rouge (le regretté Patrick Roy). Tenue correcte exigée : la règle est également appliquée aux femmes, parfois avec excès de zèle. Dans son livre Histoire politique du pantalon, l’historienne Christine Bard raconte qu’en 1972, Michèle Alliot-Marie, alors jeune conseillère politique, se vit refuser l’entrée de l’Assemblée au motif qu’elle portait… un pantalon : “Si c’est le pantalon qui vous gêne, je l’enlève”, répondit la future ministre du tac au tac avant de franchir les portes du palais Bourbon. Quarante ans plus tard, Cécile Duflot se fait rappeler à l’ordre, elle aussi pour une histoire de pantalon, de jean plus précisément. Dans le rôle de “l’inquisiteur” on retrouve cette fois Nadine Morano, qui n’hésitait pourtant pas à se rendre à l’Élysée en cuissardes quelques mois plus tôt. Avec la liberté vestimentaire viennent donc les commentaires, le revers de la médaille en somme. Les tailleurs flashy de Roselyne Bachelot ou la robe de Cécile Duflot peuvent en témoigner.
“François, on avait dit que tu pouvais enlever la cravate !”
C’est en ces termes que Barack Obama a signifié à François Hollande, fraîchement élu, qu’au G8 l’ambiance est détendue, plus “relax” en tout cas qu’à l’Élysée… “Ils nous montrent qu’ils ne sont plus des rois sacrés, mais des personnes ordinaires. N’importe qui peut devenir maître du monde.” expliquent dans un entretien au Monde François Gaulme, anthropologue et historien, et Dominique Gaulme, journaliste, coauteurs de Les Habits du pouvoir – Une histoire politique du vêtement masculin (Éditions Flammarion). Car ne nous y trompons pas : le costume est aussi un outil de communication. “Il y a une dizaine d’années, il ne fallait surtout pas avoir de manteau. Cela faisait trop parisien. Il fallait se vêtir d’une parka, plus proche de l’électeur.” racontent-ils à titre d’exemple. À la manière de Giscard avec son accordéon ou de Georges Marchais qui s’exprimait volontairement dans un langage familier, les hommes politiques usent de leur tenue comme un outil pour montrer leur proximité avec les électeurs. Attention cependant à ne pas désacraliser sa fonction. Le style particulier de la reine d’Angleterre, par exemple, est en adéquation avec le caractère exceptionnel de son rôle. En revanche les Ray-Ban Aviator de Nicolas Sarkozy étaient jugées trop bling-bling pour un président de la République. C’est tout le paradoxe : les Français élisent le candidat qui leur ressemble mais veulent être dirigés par un président hors du commun.