Des Flandres à la Catalogne montent en Europe des volontés d’indépendance qui, sans constituer une nouveauté, remettent dans l’actualité une question en principe réglée depuis le traité d’Amsterdam. Lequel avait réaffirmé, en 1999, la nature “nationale” des adhésions à l’Union européenne. En clair, la France fait partie de l’Europe et c’est parce que la Bretagne (par exemple) est d’abord une région française qu’elle est ensuite une région européenne. Les “néo-indépendantistes”, que l’on retrouve en Ecosse et ailleurs, voudraient être membres de l’Union européenne – et, souvent aussi, intégrés à la zone euro – sans passer par la case “Etat-nation”. Ils ne manquent pas d’arguments, notamment celui-ci : les petits pays s’administrent mieux que les grands et la taille n’est pas un handicap si elle est compensée par un jeu d’alliances et l’appartenance à une confédération telle que l’UE. Naturellement, nombre d’élus du Pays Basque sud (dans l’Espagne actuelle) se trouvent dans cet état d’esprit et ils viennent de réhabiliter le mot de “souverainisme” utilisé outre-Atlantique par les Québécois voulant s’affranchir de la tutelle d’Ottawa. Du côté de Bilbao ou de Vitoria, la capitale de la région basque autonome, l’appellation est nettement moins douloureuse que celle “d’indépendantisme”, susceptible d’être identifiée à la traînée sanglante laissée par ETA.
La crise aidant, tous les souverainistes, indépendantistes ou autonomistes ont-ils plus de chance que d’être entendus que dans le passé ? Il leur sera objecté que leur objectif majeur reste de s’affranchir des solidarités imposées au sein de leurs propres états, l’exemple le plus flagrant étant celui des Flamands ne voulant “plus payer pour les Wallons”. Dès lors, la question de leur maintien dans un ensemble solidaire et européen plus vaste encore se poserait en termes clairs : quelle serait la contribution à l’édifice communautaire de ces régions en principe “riches” si leur principale motivation tient dans le désir de financer le moins possible les autres ?
Les dirigeants européens – à commencer par les membres de la Commission – auraient cependant tort de simplement hausser les épaules devant ces revendications ou de les laisser au seul arbitrage des états membres “historiques” de l’Union. D’abord parce que les “souverainistes” d’aujourd’hui, tel le nouveau maire d’Anvers, ont obtenu leur légitimité du suffrage universel. En raison, ensuite, des règles imposées par l’Europe elle-même, via notamment le nouveau traité dit de “stabilité économique” ratifié en France début octobre. Quand les élus d’Ecosse ou de Catalogne affirment qu’ils n’auraient pas de difficultés à “entrer dans les clous” des normes de bonne gouvernance économique s’ils n’étaient pas obliger de donner de l’argent à Londres ou à Madrid, faut-il les entendre ? Oui, ne serait-ce que pour leur démontrer en réponse que leur raisonnement aboutirait au contournement des états et, sans doute, à une Europe encore plus difficile à gérer. Mais, pour cela, il faudrait que la Commission s’empare du sujet et elle ne semble guère disposée à ouvrir cette nouvelle boîte de Pandore.