Depuis octobre 2011, les élus de Seine-et-Marne, de Seine-St-Denis et du Val d’Oise sont réunis au sein d’une association pour réfléchir ensemble aux projets d’aménagement du territoire du Grand Roissy et s’assurer de la défense de leurs intérêts et besoins dans l’élaboration du Grand Paris.
Un entretien avec Patrick Renaud,
Président de l’association des Collectivités du Grand Roissy, Président de la Communauté d’agglomération de Roissy Porte de France
Pourriez-vous nous présenter l’Association des Collectivités du Grand Roissy ?
Regroupant les départements de Seine-et-Marne, Seine-Saint-Denis et du Val-d’Oise, l’Association des Collectivités du Grand Roissy, créée en 2011, dénombre 57 collectivités locales (Conseils généraux, communes, Communautés de communes et d’agglomération) situées à proximité de l’aéroport. En réponse aux reproches émis contre l’absence de gouvernance de ce territoire, les élus ont souhaité travailler ensemble et se rassembler au sein de cette organisation. Afin de prendre en main le destin des 600 000 habitants de ce secteur, il est nécessaire de parler d’une seule et même voix pour le développement de ce bassin d’activité. Compétents sur les domaines de l’économie, de la mobilité, des logements, de l’emploi, de la formation et de l’environnement, tous se sont accordés sur la nécessité de bâtir un SCOT commun (Schéma de cohérence territoriale) d’ici deux à trois ans. Dans quelques années, les communes de trois départements travailleront en harmonie avec ce schéma territorial. Nous prendrons en compte les grandes disparités présentes sur nos territoires, et nous avons la volonté nécessaire pour réussir.
L’association a commencé, dès sa création en 2011, à mettre en place différentes commissions relatives notamment à l’environnement ou la protection de l’agriculture, afin de réfléchir au mieux aux projets qu’elle peut engager dès aujourd’hui et à l’élaboration du futur SCOT. Les disparités sociologiques existant entre les espaces ruraux, urbains et les petites et grandes communes sont une difficulté auxquelles ce schéma territorial devra pallier. Nous souhaitons à la fois être les représentants reconnus par le monde économique, l’Etat, la région et la société civile pour prendre les bonnes décisions. L’unité fait la force, elle nous aidera à donner à ce territoire ce qu’il mérite.
Comment s’est déroulée la mise en place de l’exécutif et quelles sont ses principales ambitions ?
L’exécutif compte 12 membres ainsi répartis : trois représentants des collectivités locales pour chacun des trois départements, et un de chaque conseil général. Les membres du bureau et les vice-présidents ont rapidement été nommés avec l’objectif de garantir un équilibre entre les grandes et les petites communes pour que toutes soient bien représentées.
Etant élu à la ville de Roissy-en-France depuis 1983, mes collègues m’ont fait confiance et m’ont donné les rênes de cette association. J’assume également la présidence de la Communauté d’agglomération Roissy Porte de France, du SIEVO (syndicat mixte d’étude et de programmation pour le développement de l’Est du Val d’Oise) et suis élu à l’EPA (Etablissement public d’aménagement) Plaine de France. Ayant œuvré pendant plus de 30 ans sur la plate-forme aéroportuaire, je connais bien le territoire et suis prêt à relever le défi du développement de cette association.
La principale ambition de cette organisation est de se faire connaitre et clamer haut et fort qu’elle est capable de prendre le destin de son territoire en main. Etant élus locaux, nous sommes en effet les mieux placés pour connaître les besoins en transports, formation et réclamer les universités qui nous manquent. Notre objectif est donc d’apporter un espoir et trouver des solutions pour redonner du travail et des logements à nos habitants. Sur ce sujet, l’association s’est engagée à bâtir 30 % de logements sociaux pour les nouvelles zones d’habitation du nord.
Pouvez-vous nous parler du projet de métro, la ligne rouge du Grand Paris Express, que vous considérez comme une priorité ?
L’association a entrepris une démarche officielle auprès du gouvernement pour la mise en service en 2025, de la ligne « rouge », tronçon du Grand Paris Express desservira l’aéroport Roissy Charles de Gaulle. Une pétition a également été signée par plus de 10 600 personnes et montre la forte attente des habitants en matière de mobilité. Enfin, une cinquantaine d’élus s’est rassemblée, le 23 janvier dernier, à l’Assemblée nationale pour présenter à la presse les arguments avancés ; le premier étant que la population connaît un fort chômage, malgré le nombre d’emploi offert par la présence d’un aéroport. Ce problème pourrait être pallié par un aménagement des infrastructures de transport qui seraient un atout considérable pour une zone aéroportuaire active 7j/7, 24h/24, tous les jours de l’année. Les 25 projets que nous sommes en train de développer créeraient directement 165 000 emplois, correspondant à un investissement privé de plus de 7 milliards d’euros et entrainant indirectement la création de dizaines de milliers d’autres, liés à la construction future d’équipements dédiés à ces nouvelles entreprises.
Ensuite, le bon fonctionnement de l’aéroport nécessite une remise en ordre de son accès, et un rabattement sur un métro pour désengorger les gares RER surchargées. C’est tout l’intérêt des voyageurs et des habitants de disposer de lignes modernes reliées à l’ensemble du réseau parisien avec l’installation de quatre gares supplémentaires, sans oublier un autre tronçon pour les villes de Clichy, Montfermeil, Sevran et Aulnay. Un aéroport sert évidemment au développement d’un pays entier, mais doit également permettre aux populations vivant à proximité de bénéficier du dynamisme économique qu’il engendre. Nous souhaitons d’ailleurs former des jeunes, en amont, à tous les nouveaux métiers bientôt créés sur le territoire, par l’apprentissage de langues, des métiers d’accueil, de l’aérien et du tourisme d’affaires. Dans le but de développer le nord du Grand Roissy, des constructions de logements sont prévues, et nécessiteront d’être bien desservis pour que des personnes puissent y vivre. La mobilité n’est donc pas un simple enjeu, mais entraîne des problématiques beaucoup plus globales.
Ne pas installer ces infrastructures serait une lourde erreur au niveau économique et social, car cela ne donnerait pas confiance aux futurs investisseurs. Nous pensons et surtout espérons que le gouvernement le comprendra et mettra tout en œuvre pour satisfaire nos besoins et ambitions.
La ligne directe Roissy-Gare de l’Est, le CDG Express est en cours d’élaboration, qu’en pensez-vous ?
Ce projet va peut-être handicaper notre aménagement du territoire. Il est parfaitement compréhensible que certains voyageurs aient besoin d’une liaison directe et rapide de l’aéroport à la ville de Paris. Seulement, cela n’a rien à voir avec ce que nous demandons. Ici, il s’agit d’un projet envisagé par l’aéroport comprenant uniquement des investissements privés, comme l’a précisé dernièrement le Premier ministre. Nous n’avons pas d’autres nouvelles sur ce projet, mais espérons qu’il ne fera pas d’ombre à celui, plus global, d’aménagement du territoire que nous requerrons.