Le mercredi 27 mars, l’amphithéâtre Richelieu de la Sorbonne a reçu le ministre des Affaires Etrangères pour une conférence destinée aux étudiants sur le thème « La France puissance d’influence : quelle politique internationale ? ». Avant de commencer, Laurent Fabius n’a pas manqué de rendre hommage au stratège politique de Louis XIII, dont le portrait majestueux orne l’entrée du Quai d’Orsay, surement, confie-t-il, pour rappeler à ses successeurs que Richelieu n’avait œuvré que pour une chose : la puissance de la France.
Chef de la diplomatie française devant « penser en homme d’action et agir en homme de pensée » comme le disait Bergson, son action se divise en deux temporalités : les orientations générales et les crises urgentes à résoudre. Parmi celles-ci, il a souhaité présenter les situations au Mali, en Syrie, en Iran avec la problématique du nucléaire militaire et évidemment le conflit israélo-palestinien, en concluant que « 2013 ne [devait] pas être une année blanche pour la paix ».
La stratégie à long terme assurant une place à la France sur la scène internationale, doit, quant à elle, être redéfinie dans un monde éclaté, instable et craintif. Éclaté car la puissance d’un État est caractérisée par de multiples éléments : l’économie, l’armée, la diaspora, les investissements, la culture, la place dans les organisations internationales… Instable parce que les évolutions sont aujourd’hui extrêmement rapides et les prévisions à 2030 ou 2050 laissent entrevoir un total bouleversement des puissances, jamais vu depuis des siècles. Et enfin craintif car les dispositifs mis en place pour un monde plus sûr, comme l’ONU, ou l’Union européenne, paraissent aujourd’hui tellement inefficaces pour le peuple que leur défiance entraine une montée des nationalismes. Un constat grave que Laurent Fabius choisit de conclure en citant Gramsci : « La crise, c’est quand le monde ancien n’a pas encore disparu et que le nouveau n’est pas encore là ».
Malgré tout, la France détient encore et toujours des atouts qui font d’elle une puissance d’influence regardée, écoutée et respectée. Au niveau économique, certains chiffres sont intéressants à rappeler, en ce temps où elle parait être en déclin : 5e puissance économique et commerciale, 3e pays le plus innovant de la planète et 4e recevant le plus d’investissements étrangers. Côté diplomatique, elle est membre du G20, du G8, de l’OTAN, de l’OCDE. Elle siège de façon permanente au conseil de sécurité de l’ONU et détient l’arme atomique, arme dissuasive et donc protectrice par excellence. Sa langue est la plus enseignée après l’anglais et sera parlée par 750 millions de personnes en 2050. Enfin, la France demeure le pays des droits de l’homme, se porte avocate des causes perdues et fait naître des intellectuels, philosophes et scientifiques reconnus de tous.
Ce constat établi, les missions que la France s’est assigné consistent à garantir la sécurité contre des menaces toujours plus nombreuses et nébuleuses que sont le terrorisme, le trafic de drogue et les conflits inter- étatiques liés à la religion et à l’ethnie. Ensuite, donnant l’exemple symbolique de la suppression de la circulaire Guéant, Laurent Fabius souhaite que son pays demeure une puissance culturelle et démocratique afin d’assurer son soutien aux citoyens du monde dans leur quête de liberté.
Surtout, le ministre a annoncé que la diplomatie française prenait une nouvelle orientation en soutenant davantage l’économie. Une direction dédiée aux entreprises et aux décisions économiques sera mise en place au Quai d’Orsay pour que les ambassadeurs et diplomates deviennent «chefs de l’export français». Une démarche à l’origine de la « Journée Quai d’Orsay-entreprises » du 9 avril dernier.