Dans le cadre de l’un des sept groupes de travail “pour une nouvelle Assemblée nationale” lancés en septembre par le président François de Rugy, la députée LREM de la 2e circonscription du Pas-de-Calais Jacqueline Maquet a planché sur le “statut des collaborateurs”. Une juste reconnaissance lui tenait à cœur.
Le statut des collaborateurs parlementaires s’est trouvé au coeur de certaines polémiques lors de la récente campagne en vue de l’élection présidentielle. Peu après l’installation du nouveau gouvernement, d’autres controverses ont surgi, concernant les collaborateurs de députés européens. Pensez-vous que la loi de moralisation – qui a repris vos propositions – soit désormais de nature à mettre fin au risque de soupçons, notamment à propos des “emplois familiaux” ?
Il va sans dire que le “Penelope Gate” et les autres affaires découvertes durant la dernière campagne présidentielle ont choqué tous nos concitoyens. Cependant, je ne pense pas qu’il faille jeter l’opprobre sur l’ensemble des parlementaires : j’ai moi-même connu certains élus qui avaient embauché leurs enfants ou leurs épouses sans que cette situation n’impacte la qualité de leur travail, bien au contraire. Car il ne faut pas oublier que certaines entreprises familiales tournent bien et forment de réelles équipes offensives.
S’il est dommage de devoir lever les soupçons avec un texte, je pense que le contexte lamentable des dernières élections ne nous laissait guère le choix. L’interdiction des emplois familiaux était un signal fort attendu par nos concitoyens et constitue déjà une partie de la résolution pour prévenir certains abus. Le cheminement sera encore assez long pour reconquérir la confiance des Français et ne dépendra pas uniquement de la loi sur la moralisation de la vie publique, ni du travail que nous avons réalisé sur le statut des assistants parlementaires. La réforme constitutionnelle sera quant à elle une prochaine étape.
Il va sans dire que le “Penelope Gate” et les autres affaires découvertes durant la dernière campagne présidentielle ont choqué tous nos concitoyens.
Des chiffres difficiles à vérifier circulent quant au nombre d’assistants aujourd’hui sans emploi du fait du renouvellement politique de l’hémicycle. De quelles informations disposez-vous à ce sujet ?
Notre groupe de travail a dû dialoguer avec les services et les fonctionnaires de l’Assemblée nationale, dont la contribution a été admirable. Au final, nous avons réussi à obtenir le nombre d’assistants sortants en juin : 1250 dont 167 ont été réembauchés. Toutefois, il est à ce jour impossible de savoir si les collaborateurs sortis du système ont retrouvé du travail ou pas, même si j’en rencontre parfois certains dans les cabinets ministériels ou les autres administrations. Cette réflexion a en tout cas beaucoup guidé nos propositions.
Lors de la dernière législature, un débat avait d’ailleurs eu lieu en présence de Claude Bartolone au sujet des indemnités de licenciement à la fin du mandat. Les syndicats avaient alors demandé à ce qu’elles soient du même niveau qu’un licenciement économique. Si les sortants n’ont malheureusement pas pu en bénéficier, la loi de la moralisation prévoit dans l’un de ses décrets que l’indemnité de licenciement des assistants parlementaires sera du même montant que le licenciement économique en cas de défaite du député. Leur statut en sera donc beaucoup plus amélioré.
Collaborateurs recrutés avec des contrats de droit privé, les anciens assistants n’ont pas la possibilité de se présenter aux concours internes de l’administration. Est-ce que cette situation peut évoluer ?
Long débat que ce sujet ! Marquée par mon expérience lors du premier mandat (2007-2012), j’ai abordé mon rôle de rapporteure de manière volontariste car je trouvais qu’il manquait un véritable statut pour redonner de la légitimité et de la reconnaissance au travail des collaborateurs parlementaires. Dix-neuf propositions ont donc été faites pour que la prochaine convention collective soit orientée sur le programme de formation des assistants, afin de perfectionner leur emploi dans l’hémicycle tout en facilitant une éventuelle reconversion professionnelle. De la sorte, ils pourront avoir une porte de sortie préparée et construite lorsqu’ils voudront quitter leurs fonctions à l’Assemblée nationale. J’ai d’ailleurs moi-même accompagné l’une de mes assistantes lorsqu’elle m’a fait part de son souhait de réorientation : aujourd’hui il ne se passe pas deux semaines sans que l’on ne se rencontre ou déjeune ensemble ! C’est ce que j’appelle une belle sortie et j’aimerais que davantage de collaborateurs puissent en profiter à l’avenir.
L’interdiction des emplois familiaux était un signal fort attendu par nos concitoyens et constitue déjà une partie de la résolution pour prévenir certains abus.
Il a été dit que la réduction envisagée du nombre de parlementaires dans le cadre d’une grande réforme institutionnelle pourrait s’accompagner de la possibilité, pour les nouveaux députés et sénateurs de disposer de collaborateurs supplémentaires. Que pensez-vous de cette idée ?
Ça se discute, j’y suis favorable dans la perspective des missions d’évaluation que le président de la République souhaiterait voir les députés exercer. Car de plus toutes les circonscriptions ne se ressemblent pas et ne nécessitent pas le même travail en fonction des spécificités géographiques, territoriales qui sont les leurs. J’aimerais personnellement déployer cette mesure sur le terrain mais nous manquons de moyens supplémentaires à ce jour.
Le Parlement français peut-il, pour s’en inspirer ou s’en différencier, se préoccuper du statut des collaborateurs des députés européens ?
Notre ambition consiste déjà à nous rapprocher du Sénat tout en ayant une gestion séparée. Il s’agirait dans un premier temps de travailler ensemble pour harmoniser nos organisations, observer ce qui marche ou non au sein de nos institutions respectives, etc. Une fois ce rapprochement fait nous pourrons peut-être nous pencher sur le Parlement européen, mais cet objectif me semble à ce jour encore un peu lointain.
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