Findus, Picard, Ikea… il ne se passe plus un seul mois sans qu’un scandale alimentaire éclate au grand jour. Comment y réagissez-vous ?
Je ne peux que condamner ces cas de fraude qui altèrent la confiance des consommateurs. Il ne faut pas pour autant tout mélanger. Les dernières affaires ne doivent pas laisser penser que notre législation européenne sur la traçabilité ne fonctionne pas, car nous avons pu remonter le parcours de la viande incriminée. La démarche a été possible grâce au renforcement des dispositions sur la traçabilité suite à la crise de la vache folle.
Concernant le scandale de la viande de cheval, je veux souligner le fait qu’il n’y a aucun problème de sécurité alimentaire. Tous les tests effectués ont montré que la viande n’était pas dangereuse pour la santé.
De quelles lacunes du système ces fraudes résultent-elles ?
Je le répète, il s’agit d’une fraude massive et il faudra trouver et sanctionner les responsables, sans toutefois remettre en cause notre législation européenne qui a maintes fois fait ses preuves. Il existe en effet une réglementation sur l’étiquetage et personne n’a le droit d’y déroger.
Nous devons tout mettre en œuvre pour éviter que de tels agissements ne se reproduisent, en donnant notamment un rôle de coordination de l’enquête à un organe européen. L’organisme « Europol », agence européenne de police criminelle intergouvernementale qui facilite l’échange de renseignements entre polices nationales, a d’ailleurs été chargé de coordonner l’enquête judiciaire.
L’étude d’impact actuellement menée par la Commission européenne évaluera quant à elle la possibilité de rendre obligatoire l’étiquetage de l’origine de la viande dans les plats préparés.
De nouvelles dérives sont-elles encore à redouter ?
Je ne l’espère pas mais il sera toujours difficile d’arriver au risque zéro en matière de fraude. Ce que nous pouvons faire – et l’Union européenne s’y attèle – c’est trouver les responsables le plus rapidement possible et faire en sorte que les sanctions soient dissuasives et harmonisées à l’échelle européenne.
Dans quelle mesure l’Europe s’implique-t-elle dans la prévention de ce genre d’affaires ?
L’Union européenne s’attache à protéger les consommateurs et à assurer l’intégrité des denrées alimentaires emballées qui sont commercialisées sur son territoire, car ce qui figure sur l’étiquette doit correspondre au produit vendu.
La législation européenne en matière de sécurité alimentaire et de protection des consommateurs est claire : ces derniers doivent être informés sur ce qu’ils achètent et tous les ingrédients doivent figurer sur l’emballage. Si le respect de ces dispositions relève de la compétence des États membres, la découverte de viande de cheval dans des produits présentés comme contenant du bœuf révèle que cette exigence fondamentale n’est pas toujours respectée.
La sanction et le durcissement de la réglementation pourraient-ils ouvrir la voie à une responsabilisation des filières agroalimentaires ?
Mais les filières agroalimentaires sont déjà responsables ! Le règlement européen n°178/2002 établissant les principes généraux de la législation alimentaire prévoit l’obligation pour les exploitants du secteur alimentaire de mettre en place la traçabilité à toutes les étapes de la production, de la transformation et de la distribution. L’objectif est de permettre le retrait des denrées lors d’alertes sanitaires.
Au-delà du consommateur, ces crises soulignent-elles la menace que représente la mondialisation pour le secteur agricole ?
Il faut un système de traçabilité le plus robuste possible, ce que l’Union européenne s’efforce de garantir, en particulier depuis la crise de la vache folle. Ce scandale ne doit en aucun cas remettre en question le fonctionnement du marché intérieur qui est la pierre angulaire de l’UE. Je ne crois pas que la mondialisation soit une « menace » pour le secteur agricole: elle doit au contraire être un atout. D’ailleurs l’agroalimentaire français en profite, puisque sa balance commerciale est excédentaire de 11,6 milliards d’euros. L’année 2012 a vu une augmentation de 144 millions par rapport à 2011 : il s’agit d’un record historique, le deuxième surplus après celui de l’aéronautique. Sachant que les produits du terroir, comme le Cognac, le Champagne, les vins et le fromage qui en représentent les quatre cinquièmes.
Quelles mesures concrètes pourraient améliorer la traçabilité des produits ?
Sous la pression de plusieurs États membres, la Commission européenne s’est engagée à accélérer ses travaux sur l’étiquetage de l’origine de la viande utilisée dans les plats préparés. La France, l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Autriche, l’Irlande et le Portugal ont demandé qu’un rapport de la Commission, normalement prévu pour la fin de l’année, soit livré avant l’été. Il est nécessaire à terme qu’un règlement européen organise les modalités de l’indication obligatoire de l’ingrédient viande dans les denrées alimentaires qui en contiennent.
En tant que députée européenne, j’avais d’ailleurs demandé, en 2011, que dans le règlement relatif à l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, la mention d’origine des produits que nous consommons s’applique à une plus large gamme de produits. Malheureusement, cette disposition n’a pas été retenue. Il faudra enfin renforcer l’harmonisation des sanctions en cas de fraude dans la chaîne d’approvisionnement.