D’après Romain Felli, chercheur à l’université de Genève, les réflexions sur l’adaptation au changement climatique ne datent pas d’hier. Depuis les années 1970, des spécialistes tentent d’intégrer de nouvelles manières de vivre avec l’évolution du climat. Deux réponses politiques émergent alors : une plus forte intervention étatique d’un côté, la création de flexibilité par le marché de l’autre.
Quelles réponses apporter ?
Pour Françoise Coutant, vice-présidente de la région Nouvelle Aquitaine en charge du climat et de la transition énergétique, l’adaptation et l’atténuation du changement climatique sont au cœur des politiques publiques. En témoigne la création, en mai 2016, du Conseil Permanent pour la Transition Énergétique et du Climat (COPTEC), dont les dispositifs ont été nombreux. En 2013, par exemple, un rapport sur les impacts du changement climatique a été publié, appelé Acclima Terra. L’Artéé, l’Agence Régionale pour les Travaux d’Économie d’Énergie, a été créée à des fins de rénovation énergétique de l’habitat privé. La mise en place de la plateforme Réno’Aqt a quant à elle pour but de « favoriser et faciliter l’accès à la rénovation thermique » tandis que le fonds d’investissement « Terra Energies » a été lancé pour dynamiser les projets d’énergie renouvelable. L’élue se montre déterminée : « Qu’est-ce qu’on fait d’ici à la COP24 ? On agit ».
Selon le climatologue Jean Jouzel, la communauté scientifique, qui recherche les causes du changement climatique, doit apporter le maximum d’informations possible car « la connaissance est à la base de l’adaptation ». Pour lui, l’action des scientifiques est essentielle pour « savoir où on va ». Cependant, les initiatives doivent venir de l’ensemble de la société, et pas seulement de la sphère publique et politique, car pas un seul secteur de l’économie ne sera épargné face aux changements à venir.
L’inquiétude face aux catastrophes naturelles
Le secteur de l’assurance s’inquiète fortement des conséquences du changement climatique. Selon une étude de la Fédération Française de l’Assurance de novembre 2015, d’ici à 2040, l’augmentation de la sécheresse, des inondations, des tempêtes et les dommages matériels qu’ils entraineront coûteront 44 milliards d’euros aux assureurs. Pour Stéphane Penet, directeur des Assurances Dommages et Responsabilités de la FFA, à terme, nos régimes d’assurance ne pourront pas couvrir ces frais.
Valérie Lacroute, députée maire de Nemours en Seine-et-Marne, témoigne très concrètement des effets dévastateurs qu’a eu l’inondation survenue dans sa ville le 1er juin 2016 : 200 commerçants ont été touchés ainsi que de nombreux habitants. 30% des commerces n’ont toujours pas rouvert. Elle parle d’un véritable « sentiment d’impuissance des habitants face à la montée de l’eau ».
Pour Géraud Guibert, président de la Fabrique écologique, la France n’a absolument pas pris la mesure de la nécessité d’adaptation. En effet, à long terme, les inondations et la submersion seraient les enjeux les plus préoccupants. 457 millions d’euros d’argent public ont par exemple été nécessaires pour réagir à la tempête Xynthia de 2010. Selon lui, « la culture et la mémoire du risque sont insuffisantes ».
D’autres acteurs ont exprimé leurs craintes face au climat. Pour Rodolphe Bocquet, directeur général de Beyond-ratings, le changement climatique est facteur d’une incertitude qui pèse sur les transactions financières. De son côté, Agnès Ducharne, directrice de recherche au CNRS, affirme que le territoire français connaîtra d’ici 2070 une baisse importante des ressources en eau à laquelle il faudra s’adapter mais qu’il faut également atténuer. Enfin, Philippe Maurange, rédacteur en chef adjoint de la Revue du Vin de France, souligne les répercussions sur les agriculteurs et plus particulièrement sur les viticulteurs qui doivent trouver des solutions d’adaptation afin de continuer leur production.
« Une plus grande justice climatique »
La Banque Mondiale, présente à la COP22 à Marrakech en novembre 2016, a affirmé que 26 millions de personnes dans le monde vivaient dans l’extrême pauvreté à cause des aléas climatiques. Chakib Benmoussa, ambassadeur du Maroc en France, a rappelé que 35 des 50 pays les plus vulnérables étaient africains, ce qui impliquait « l’urgence de l’action et la nécessité d’une plus grande justice climatique ». Il déplore en effet que l’Afrique ne capte que 4% des fonds dédiés aux questions touchant le dérèglement du climat.
Photo en une : Chakib Benmoussa, ambassadeur du Maroc en France, intervenant lors du colloque / © Groupe Caisse des Dépôts.