Depuis plus d’un an, la pandémie de Covid-19 bouleverse nos habitudes et met à rude épreuve notre société. Dans cette crise qui s’est installée dans la durée, l’implication remarquable et le dévouement sans faille des professionnels de santé ont fait et font encore tenir notre pays aujourd’hui. A l’arrière de ce front visible contre le virus, les services publics et la société civile se sont mobilisés pour en limiter la propagation. Le secteur du numérique a lui aussi contribué à cet effort général et il aura à cette occasion fait la démonstration du rôle central qu’il peut jouer dans le système de santé : de nouvelles solutions innovantes ont été créées, certains usages se sont généralisé d’une façon spectaculaire.
Sans le numérique, pas de système national d’information de dépistage (SIDEP), qui permet de piloter l’ensemble de la politique française de test et de suivi de l’épidémie. L’ensemble de la stratégie de suivi des contacts est également fondée sur les outils numériques, du système utilisé par la CNAM à l’application TousAntiCovid. Dans leur quotidien, les Français peuvent plus rapidement et facilement trouver un rendez-vous pour se faire vacciner grâce au site internet ViteMaDose. Enfin, ils sont mieux accompagnés : le nombre de téléconsultations par semaine a été multiplié par 100 depuis le début de la crise. Mais, le numérique accompagne également les personnels soignants : ils peuvent trouver une solution numérique adaptée à leur besoin sur le Guichet innovation numérique et suivre la disponibilité régionale des lits en soins critiques via la plateforme ROR+. Ces exemples parmi tant d’autres témoignent de la force et la vitalité de l’écosystème français d’e-santé.
Malgré ces succès, la crise a mis en évidence la nécessité d’aller plus loin dans la modernisation de notre système de santé afin de parer l’absence de certains outils et l’insuffisance d’interopérabilité, de sécurité, de réversibilité et de convergence des systèmes d’information en santé. En un mot, la numérisation de notre système de santé a accumulé depuis trop longtemps un retard important, au détriment de la qualité des soins et de la pénibilité du travail du personnel soignant. Derrière les outils numériques, c’est l’humain qui est en jeu.
La crise a mis en évidence la nécessité d’aller plus loin dans la modernisation de notre système de santé.
Afin de remédier à ces constats, le Ségur de la Santé a mobilisé une enveloppe de 19 milliards d’euros afin d’accélérer les transformations dont notre système de santé a besoin. Sur cette enveloppe totale, un montant de 2 milliards d’euros est mobilisé pour le numérique. Ces investissements supplémentaires s’inscrivent dans le cadre des travaux entrepris depuis deux ans par le Gouvernement, avec notamment la feuille de route du numérique de santé. Les avancées techniques qu’apportent le numérique doivent faciliter et simplifier la vie des Français et le quotidien des soignants.
Numériser les systèmes de santé, c’est d’abord simplifier le métier des soignants afin de leur permettre de se concentrer davantage sur le bien-être de leurs patients. Pour cela, un bouquet de services numériques est en cours de développement. Chaque année, 100 millions de rendez-vous médicaux ne sont pas honorés en France. Ces heures perdues représentent le travail de 25 000 médecins! La prise de rendez-vous en ligne et la meilleure gestion des consultations qui l’accompagne permettront de diviser le nombre d’heures perdues par un facteur 2 à 5. Par ailleurs, le Dossier Médical Partagé (DMP), le carnet de santé numérique, permet à l’usager de partager ses données de santé à tous les professionnels de santé qui le prennent en charge de manière simple et sécurisée. A l’image du DMP, l’Etat développe également, en étroite collaboration avec ses partenaires, des services socles sur lesquels de nouveaux services et outils pourront s’appuyer (e.g. l’identifiant national de santé ou les messageries sécurisées de santés).
Chaque année, 100 millions de rendez-vous médicaux ne sont pas honorés en France. Ces heures perdues représentent le travail de 25 000 médecins!
La numérisation des systèmes de santé bénéficiera également aux citoyens et aux citoyennes. D’ici 2022, tout citoyen disposera d’un espace numérique de santé individuel (ENS) lui donnant les moyens d’être acteur de sa propre santé. Il y retrouvera les documents déposés dans son dossier médical partagé (DMP) et d’autres données de santé (comptes-rendus d’hospitalisation, résultats d’examen). Plus de papiers qui traînent dans les tiroirs ! Non seulement l’accès à ces documents sera sécurisé avec de très fortes garanties, mais il sera également à la main du patient : il pourra, s’il le souhaite, bloquer certains accès, supprimer une autorisation, masquer ou ajouter un document. L’usager trouvera également dans son espace numérique toutes les informations pour s’orienter dans le système de santé : quels sont ses droits à l’assurance maladie ? Quelle est l’offre de soin à proximité de chez lui ? Où peut-il prendre rendez-vous ? Une seule plateforme pour trouver facilement les réponses à ses questions, être plus facilement soigné et pris en charge, et pour gérer son parcours de soin.
La numérisation du système de santé sera le catalyseur de sa transformation, j’en suis persuadé. Les outils numériques remettront l’humain au centre de toutes les considérations. Ils donneront davantage de flexibilité, de marges de manœuvres et de contrôle aux soignants et aux patients. Plus largement, avec l’avènement de l’intelligence artificielle et la montée en puissance des capteurs connectés, le numérique révolutionnera également la médecine en fournissant de nouveaux instruments d’aide au diagnostic ou de réalisation de soin.
Le numérique ne pourra néanmoins tenir ses promesses que sous deux conditions : l’ouverture et la confiance. Sans ouverture, les applications ne peuvent pas interagir entre elle, le système se fige, l’innovation étouffe car elle ne peut pas émerger. Sans la confiance, les utilisateurs n’utiliseront pas les solutions qui seront condamnées à n’être que des outils marginaux. C’est à l’Etat de créer le cadre au sein duquel les innovations pourront fleurir et réaliser leur potentiel. Cela passe par la création d’une gouvernance adaptée, de référentiels communs mais surtout par la sécurisation des infrastructures de santé et des données etla mise en place de conditions favorables à l’innovation.
Le numérique ne pourra néanmoins tenir ses promesses que sous deux conditions : l’ouverture et la confiance.
Les infrastructures de santé sont des réseaux sensibles dont le dysfonctionnement se traduit par la mise en danger de la vie des patients dans le monde réel. Alors que la menace de la cybermalveillance se renforce depuis 2010 – une attaque majeure d’hôpital par semaine depuis le début de l’année –, il est crucial de sécuriser l’arrivée du numérique dans le système de santé. En février 20201, le gouvernement a annoncé un plan de 350 millions d’euros pour accompagner les hôpitaux dans la protection de leurs systèmes d’information, avec l’aide de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI). La stratégie nationale pour le Cloud annoncée début mai permettra, quant à elle, de garantir la protection des données médicales. Les données de santé des Français seront stockées sur des plateformes françaises ou européennes, empêchant tout espionnage des données par des acteurs étrangers. Que ce soit pour les infrastructures ou les données de santé, l’Etat veillera au respect des plus hautes exigences de sécurité.
Nous sommes entrés dans une Renaissance numérique qui transformera en profondeur la santé au bénéfice de tous.
Garantir la sécurité informatique permet aux citoyens de partager leurs données de santé aux acteurs de la recherche et de l’industrie en toute confiance. Ces données nourrissent la recherche et l’innovation pour améliorer la santé de tous : avec le traitement et le croisement des données, il sera demain possible d’améliorer le dépistage d’un cancer, d’analyser les effets secondaires d’un traitement, ou de faire évoluer les essais cliniques. Le Health Data Hub valorise ce patrimoine collectif et renforce nos capacités à innover pour faire de la France un leader de l’analyse des données de santé. Cette plateforme est le moteur de la médecine du futur.
Le Gouvernement est donc pleinement mobilisé pour faire advenir la révolution numérique dans le système de santé. Au XVIème siècle, Ambroise Paré, André Vésale et bien d’autres médecins encore bouleversaient la médecine, la faisant entrer dans la modernité. Je suis persuadé que nous sommes entrés au XXIème siècle dans une Renaissance numérique qui transformera en profondeur la santé au bénéfice de tous.
Crédit photo : Gézelin Grée