À quoi sert la feuille de route du numérique en santé, quelle est sa philosophie et que s’est-il passé depuis sa création en 2019 ?
La feuille de route du numérique en santé avec ses cinq grandes orientation, s’inscrivait dans un constat, formalisé par Dominique Pon fin 2018, qui révélait qu’entre les discours sur le parcours patient, le décloisonnement, la coordination entre les professionnels, le patient au cœur du système de santé… La réalité était tout autre !
Si tout le monde avait sa part de responsabilité, il s’agissait pour nous, puissance publique, de remonter aux causes de ces difficultés pour arriver à balayer devant notre porte et à faire mieux collectivement, avec l’ensemble des Agences et des opérateurs publics nationaux et régionaux qui gravitent autour du numérique en santé.
La finalité du numérique en santé est de mieux prévenir et mieux soigner tout en respectant un cadre de valeurs : citoyen, humaniste et éthique. Une troisième voie entre le numérique capitaliste à l’américaine et celui de contrôle à la chinoise.
La doctrine qui a infusé nos travaux c’est celle de l’Etat-plateforme. Il met en commun certaines infrastructures techniques de base indispensables à des échanges fluides et sécurisés entre les acteurs et fixe les règles d’interopérabilité, de sécurité et d’éthique. Les pouvoirs publics ont à leur charge le développement des communs numériques : le dossier médical partagé, la messagerie sécurisée de santé, l’agenda partagé et l’e-prescription. En revanche, les services numériques à valeur ajoutée métier, comme par exemple la prise de rendez-vous en ligne, les objets connectés, les outils de télésurveillance… sont laissés aux initiatives privées, à condition de respecter les règles définies par la puissance publique et de se raccorder aux infrastructures techniques (« communs numériques »).
Le numérique n’est pas une fin en soi. C’est un moyen pour mieux coordonner les professionnels de santé, pour développer des innovations thérapeutiques et organisationnelles, pour lutter contre la fracture sanitaire, pour repositionner le citoyen au cœur du système de santé, bref pour soigner mieux.
Le numérique n’est pas une fin en soi.
En 2020, quels ont été les effets de la crise sur vos engagements ?
Dès février 2020, les acteurs publics et privés, nationaux comme locaux, ont déployé ensemble une énergie incroyable pour mettre en place les services numériques utiles à la prise en charge de la Covid-19. Nous étions au milieu du gué et nombre de projets auraient pu être fluidifiés si le virage numérique, programmé sur 2019 2022, n’avait pas été à mi-chemin. Malgré tout, des exploits industriels dont nous n’aurions jamais osé rêver dans l’administration ont vu le jour pour répondre à l’urgence. Ainsi le système d’information de dépistage (SI-DEP), avec sa plateforme sécurisée où sont enregistrés automatiquement et en temps réel les résultats des tests réalisés par l’ensemble des laboratoires de ville et établissements hospitaliers, a fait de la France un pays à la pointe du suivi épidémiologique de la Covid-19 en temps réel et exhaustif.
Avec la pandémie, un foisonnement d’initiatives portées par l’écosystème numérique se sont développées. Le recours à la téléconsultation s’est banalisé, la crise sanitaire a joué le rôle d’un accélérateur, permettant de franchir en quelques jours les étapes qui jalonnent habituellement le cycle d’adoption d’une innovation.
Deux milliards d’euros supplémentaires ont été attribués à la e-santé dans le cadre du Ségur.
À présent il nous faut capitaliser sur les leviers politiques, juridiques et financiers qui ont permis ces succès et les répliquer pour qu’à l’avenir les projets se mettent en place très rapidement en trois mois et non en huit ans !
Malgré la crise, les engagements de la feuille de route ont été tenus, et les dossiers ont avancé à marche forcée. L’implication de tous les acteurs a permis d’obtenir la confiance du gouvernement en notre capacité à la mettre en œuvre conjointement. Deux milliards d’euros supplémentaires ont été attribués à la e-santé dans le cadre du Ségur pour accélérer encore davantage la transformation. Cet investissement sans précédent offre de nouvelles opportunités qu’il ne tient qu’à nous tous de concrétiser