Représentation des territoires, Europe, politique migratoire ou encore reconstruction de la droite : autant de sujets dont le président du Sénat s’est emparé à l’occasion de sa rentrée politique. Le tout en assumant subtilement son rôle d’opposant à Emmanuel Macron.
« Nouveau monde, saison 2 » : dès le début de son discours Gérard Larcher annonce la couleur pour cet Acte 2 du quinquennat. Le président du Sénat se défend toutefois d’être « dans l’hystérie d’une opposition absolue » comme « dans l’euphorie d’une majorité alignée sans débat ».« Je suis celui qui suis » : c’est ainsi que l’intéressé définit son rôle par une formule « totalement ambitieuse et biblique » à l’heure où il s’inquiète surtout pour la démocratie. En cause, la réduction du paysage politique « à un choix binaire ». Autrement dit La République En Marche et le Rassemblement national. « J’ai une responsabilité comme président du Sénat à assumer car ce pays ne peut pas rester sans contre-pouvoir », affirme-t-il avant d’ajouter :« c’est une démocratie qui, un jour, termine dans la fragilité la plus absolue et qui peut se retrouver dans les bras de valeurs qui ne sont pas totalement les valeurs de la démocratie. Donc j’assume. »
Refondation de la droite
C’est pourquoi Gérard Larcher souhaite « inverser la verticalité » en rassemblant sa famille politique éclatée, Les Républicains, notamment à la suite aux dernières élections européennes. Plutôt qu’un projet, il propose « une nouvelle méthode » en partant des réussites du terrain. « Nous voulons bâtir un projet à partir des territoires. C’est le local qui doit inspirer le national, c’est une autre approche. La gouvernance moderne, c’est la subsidiarité. » Rappelant qu’il ne se laissera pas enfermer « entre progressisme et populisme » car « on peut trouver d’autres équilibres ». Ainsi le président du Sénat s’est embarqué dans un tour de France de la droite et du centre pour recoller les morceaux en vue des prochaines élections municipales.
Bilan de l’Acte 1
Reconnaissant au président de la République certains résultats –notamment la séquence G7 qu’il a trouvé « plutôt bonne » – Gérard Larcher s’est tout de même montré critique sur les ambitions de l’exécutif quant à la réduction de la dépense publique. « C’est près de 20 milliards de plus cette année. » Avant d’ajouter : « en 2020, la France aura le deuxième déficit le plus élevé après l’Italie. Elle sera le quatrième pays européen le plus endetté après la Grèce, l’Italie, le Portugal et la Belgique. » Quant à la relation d’Emmanuel Macron avec les élus, le président du Sénat est sans appel :« il va falloir dans la saison 2 passer des déclarations aux actes. » Se réjouissant que les maires aient « retrouvé une place centrale dans la cohésion de la nation », Gérard Larcher regrette néanmoins que « les relations avec les collectivités territoriales dans le cadre de la Conférence nationale des territoires ou des lois de finances, de l’apprentissage, de la formation professionnelle, des finances locales, n’ont pas été au rendez-vous de l’Acte 1 du quinquennat. »
Ses préoccupations pour l’Acte 2 ? L’Europe et la politique migratoire. « La relation franco-allemande s’est appauvrie » affirme-t-il, estimant que la rétablir constitue une priorité surtout face à un Brexit de plus en plus incertain. « L’Europe doit se ressaisir », conclue-t-il. Quant à l’immigration clandestine, Gérard Larcher estime qu’il est « urgent d’harmoniser les politiques d’asile et d’immigration et de renforcer les frontières extérieures de l’Union en particulier. » Ajoutant que « la France est en passe de devenir le principal pays de demandeurs d’asile au sein de l’Union européenne. »
« Le Sénat est disponible »
Le président du Sénat en est convaincu : « le mouvement des gilets jaunes s’est essoufflé, mais les braises ne sont pas éteintes. » Rappelant son attachement profond au bicamérisme, Gérard Larcher croit « en nos institutions en ces temps de doute ». Au sujet de leur réforme, « la majorité sénatoriale soutient la baisse du nombre de parlementaires, mais elle la conditionne à une juste représentation des territoires. »
En interne, le Sénat compte lancer plusieurs innovations dès cet automne, à commencer par une plateforme d’e-pétitions permettant à chaque citoyen de proposer l’inscription d’un texte législatif à l’ordre du jour ou de créer une mission de contrôle sénatoriale. Autre nouveauté :« le Sénat disposera d’un dispositif de scrutin électronique permettant à chaque sénateur de voter sur les textes depuis son pupitre ». Sans oublier la création d’un site de « fact-checking » au sujet des informations qui circulent sur le Sénat. Une première pour le Parlement à en croire Gérard Larcher.