Disparu en novembre dernier, l’ancien ministre communiste Jack Ralite, personnalité très estimée des politiques de tout bord, fut longtemps le maire d’Aubervilliers. Le Parti Socialiste est peut-être mû par une nostalgie inconsciente de l’union de la gauche version « 10 mai1981 » en organisant son congrès dans cette ville début avril. Mais ce n’est pas sûr. Le parti de la rue de Solférino, en plein déménagement, ne spécule sur aucun passéisme. On l’a bien vu lors du débat télévisé organisé le 7 mars entre les quatre postulants au poste de Premier secrétaire. Pas ou très peu de citations de François Mitterrand, de Michel Rocard, de Mendes-France ou de Jaurès. Il y avait un sorte d’accord tacite entre les participants pour ne pas donner prise au reproche de ringardisme susceptible de jaillir des rangs des partisans résolus d’Emmanuel Macron.
L’une des forces du PS, pourtant, c’est son histoire. En a-t-il connu des défaites ! Personne ne pensait qu’il se remettrait du séisme des législatives de 1993. Quatre ans plus tard, Lionel Jospin s’installait à Matignon. Nul ne pensait qu’un François Hollande résisterait au rouleau compresseur Nicolas Sarkozy. Il est pourtant allé jusqu’à l’ Elysée sans que ses amis politiques n’aient d’ailleurs conscience de l’exploit ni lui sachent gré de détenir des mandats grâce à lui.
Comme le parti néogaulliste – aujourd’hui Les Républicains – avec lequel il partage une histoire symétrique, le PS sait passer de la décomposition à la recomposition sans que ne cesse de se poser l’obsédante question du meilleur chef. Il s’est même offert le luxe de réchauffer ces dernières années contre son sein généreux des personnes qui cherchaient surtout l’occasion de le quitter. Celles-ci préfèrent désormais, à l’instar de personnalités issues de la droite, la compagnie d’un Président qui était au départ apparu – même s’il n’a jamais pris sa carte – comme l’un des leurs en tant que collaborateur de confiance de François Hollande.
La vraie question, dorénavant, pour cette formation indissociable du passé politique de notre pays, paraît celle des échéances électorales du futur. Les européennes ? Les socialistes disposent de la possibilité de réaliser un score honnête en choisissant une bonne tête de liste car la « France insoumise » risque d’en faire trop dans le discours anti-européen. Le Front national, sous un nouveau nom sans doute, va miser, de son côté, sur une flambée du nationalisme et cela risque de se révéler plus grossier que tactique. Modem excepté, les cadres du bloc majoritaire actuel devraient accuser, pour leur part, le premier vrai choc provoqué par l’impopularité de leur champion du fait de l’augmentation de la CSG. Quant à la droite républicaine, elle aura du mal à réaliser le grand écart entre l’europhilie de ses dirigeants et l’europhobie de nombre de ses militants. Il existe donc un espace pour les socialistes s’ils ne commettent pas d’erreurs. Les municipales, en 2020, offriront peu après une belle occasion de revanche sur 2014 qui apporta une déroute cuisante à cette famille naguère remarquablement implantée dans certains de ses fiefs – ne citons que Limoges ! – par héritage de la SFIO. Mais, en attendant, le nouveau Premier secrétaire devra remettre la machine en route. Pour ne pas dire « en marche », ce qui prêterait une fois encore à confusion !