En bref, en quoi consiste le coaching politique ?
Il faut d’abord bien faire la différence entre les trois métiers qui interviennent auprès des politiques : les conseillers, les coachs et les formateurs. Aujourd’hui, le terme « coaching » est surexploité notamment à cause de son effet marketing, alors qu’il s’agit d’une posture très particulière. Si le conseil consiste à préparer les discours et les éléments de langage, notre rôle est celui de guider l’élu vers ce qu’il a envie de défendre, à condition qu’il y croit vraiment. L’objectif ? Aller jusqu’aux tripes de la personne pour que la forme soit au service du fond.
Le coaching politique s’adresse en premier lieu aux candidats à des élections et à des politiques en cours de mandature, comme des maires, des adjoints, des conseillers régionaux, départementaux, ou encore des députés. La particularité de cette pratique réside aussi dans les enjeux qu’elle soulève : peut-on coacher tout le monde ? Quelqu’un pour qui l’on ne voterait pas ? Celui dont les convictions nous dérangent ? Autant de réflexions qui ont aussi été l’occasion d’étudier si le coaching était connu et reconnu dans la sphère du pouvoir.
Quelles sont les attentes principales des hommes politiques qui font appel à vos services ? De quel genre d’élus s’agit-il ?
Je travaille essentiellement avec des élus locaux issus de municipalités ou de conseils départementaux, parfois des députés. Les demandes sont multiples et démarrent souvent par quelque chose qui ne relève pas du coaching pur et dur, comme l’aisance à l’oral qui s’apparente davantage à de la formation. Au-delà de la partie technique, il s’agit de redéfinir l’image que l’on veut véhiculer, prendre conscience de ses propres valeurs pour mieux les transmettre, éventuellement remonter son niveau de confiance en soi tout en étant plus percutant dans ses discours.
Aujourd’hui, le terme « coaching » est surexploité notamment à cause de son effet marketing, alors qu’il s’agit d’une posture très particulière.
A la suite d’une élection, il arrive aussi que certains élus se rendent compte que tout ne se passe pas nécessairement comme prévu. Le but consiste alors à travailler sur le management de l’équipe qui va les entourer pendant leur mandat. Nous organisons également des coaching collectifs pour créer une dynamique de groupe et améliorer le travail dans son ensemble.
Comment appliquez-vous la méthode d’Emile Coué à la politique ?
Cette méthode s’applique à tous les domaines, puisque d’après Emile Coué « la plus grande force c’est notre imagination et non pas notre volonté ». Partant de ce principe, je fais travailler l’imaginaire de mes clients à plusieurs niveaux : comment quelqu’un qui veut se présenter à une élection se projette-t-il dans son nouveau rôle ? Qu’est ce qui le fait rêver dans le rapport qu’il a à sa ville, aux citoyens ? Autant de questions permettant de définir un programme et un projet à porter.
L’imagination joue aussi un rôle majeur lorsqu’un élu doit faire une intervention importante. Lors d’un débat télévisé, d’un meeting ou d’un discours, se visualiser en train de faire l’action aide à ancrer de bons réflexes. La méthode Coué développe aussi tout un travail sur la puissance de la parole et l’impact des mots que nous utilisons.
L’imagination joue aussi un rôle majeur lorsqu’un élu doit faire une intervention importante.
En quoi le coaching politique diffère-t-il du coaching des comédiens ou de dirigeants d’entreprise ?
Ce n’est pas tant dans le rapport à l’autre qu’au niveau des enjeux que l’approche diverge. Car le coaching est avant tout une relation de confiance entre deux personnes qui permet de débloquer des verrous ou de répondre aux questions que l’on se pose. A la différence qu’en politique les sujets traités peuvent être plus sensibles.
Quelles en sont les limites dans ce domaine en particulier ?
Il n’y a pas vraiment de limites mis à part celles que l’on se pose. Emile Coué disait que nous pouvons nous auto-suggérer, et ce de trois manières. Par le corps d’abord, comme le font les comédiens : en ce sens des études scientifiques ont même prouvé que le simple fait de sourire apaise voire enlève complètement le stress. La visualisation permet aussi de gagner en confiance tout en créant un effet boule de neige au sein de son équipe. Car si je ne crois pas moi-même aux idées que je porte, qui voudra me suivre ? Sans oublier que certains présidents de la République affirmaient rêver de l’Elysée en se rasant tous les matins… Comme s’ils s’y voyaient déjà.
Nous sommes actuellement en pleine période de campagne. Voyez-vous clairement une différence entre les candidats qui se sont fait coacher ou pas ?
Je ne pourrais pas désigner avec certitude ceux qui se sont fait coacher ; en revanche, les candidats bien préparés ont eu clairement plus d’impact que les autres dans le dernier débat. Nous avons pu y découvrir des personnalités profondément sympathiques qui ont pourtant eu beaucoup de mal à exprimer clairement leur message. C’est sur cet aspect qu’ils devraient travailler davantage.
Copyright de l’image à la Une : © Florence Bonny