Une enquête de la Banque de France montre qu’au troisième trimestre 2011, les banques ont fortement resserré les conditions d’accès au crédit pour les entreprises et les collectivités locales, ce qui gène la reprise de la croissance. Entre-t-on dans un cercle vicieux ?
En effet, c’est à peu près le scénario qui se déroule actuellement. Les chefs d’entreprises subissent de plein fouet les problèmes macroéconomiques. Cela se traduit par le ralentissement voire l’arrêt des investissements et des embauches. Alors qu’il y a un an et demi le premier souci des Petites et moyennes entre- prises était le financement, et il y a encore six mois le prix des matières premières, elles sont aujourd’hui confrontées à la baisse des carnets de commande. Les indicateurs montrent que la situation évolue dans le mauvais sens.
Le baromètre établi par le cabinet de conseil KPMG et la CGPME indique que le moral des patrons est en berne, notam- ment depuis le retour des vacances. Les fluctuations boursières des mois d’août et de septembre ont mis à mal le lent redémarrage de la croissance auquel on assistait. 62 % d’entre eux craignent que la crise boursière affecte négativement l’activité de leur entreprise… À la question “Diriez-vous que vous êtes tout à fait inquiet, plutôt inquiet, plutôt pas inquiet, ou pas du tout inquiet pour l’économie française ?”, 66 % des chefs d’entreprises se déclaraient inquiets en mai 2011. Quatre mois plus tard, en septembre, ce pourcentage atteignait 85 % !
Selon vous, la frilosité des banques à accorder des crédits est-elle ration- nelle ou est-elle le reflet de la peur liée à la crise économique ?
L’un et l’autre ! Il n’y a évidemment pas de consigne de restriction du crédit dans les banques françaises ! Mais il y a une volonté de limiter le risque potentiel lié au financement des PME. C’est pour- quoi les dossiers sont examinés avec plus d’attention et de frilosité. Les frais et les délais de financements s’en ressentent incontestablement.
Dans ce contexte, qu’attendez-vous des pouvoirs publics, au niveau national comme européen ?
Les pouvoirs publics doivent rassurer les banquiers pour qu’ils n’assèchent pas le financement des PME. La croissance française en dépend. Si les directions des établissements bancaires en sont parfaitement conscientes, elles peinent à emprunter sur les marchés l’argent destiné à être injecté dans nos entreprises. Cependant nous avons demandé au Premier ministre d’accompagner un éven- tuel nouveau plan de soutien aux banques de contreparties et d’engagements sur le financement de l’économie. Les PME n’ayant pas accès aux marchés, à la bourse, etc. leurs principaux fournisseurs d’argent restent les banquiers.
Le Fonds stratégique d’investissement (FSI) lance – avec Avenir Entreprises, filiale commune de CDC Entreprises (elle- même filiale de la Caisse des dépôts) et Oséo – un nouveau dispositif de financement en fonds propres à destination des PME. Quel regard portez-vous sur cette initiative ?
Toute initiative qui permet d’améliorer le financement des entreprises est une bonne chose. Ces obligations convertibles en actions mises en place avec Oséo et le FSI sont des quasi-fonds propres. En effet, l’idée est de renforcer les fonds propres des PME à potentiel de croissance tout en évitant l’ouverture de leur capital. Ainsi les patrons n’ont-ils pas le sentiment d’être dépossédés de leurs titres. Le succès de ce dispositif est tel que le président de la République a décidé au mois de mai d’ajouter 1 milliard d’euros au fond chargé de sa gestion.
Le salut passe-t-il par l’investissement public ?
Surtout pas. Mais bien entendu l’Éttat doit continuer à prendre les bonnes décisions comme celle d’augmenter les acomptes à la commande qui a bénéficié aux Petites et moyennes entreprises. Maintenant les pouvoirs publics doivent essayer de faire respecter les conditions de paiements tels que définies dans la Loi de modernisation économique.
Aujourd’hui, nous attendons de voir si quelqu’un, en France et sur le continent, est en capacité de redonner de la confiance à l’économie. Mais l’actualité européenne ne rassure guère les chefs d’entreprise.
Propos recueillis par Louis Le Bris