L’Europe est-elle en train de se régionaliser ? Fonds européen de développement régional, fonds social européen, comité des régions : l’UE semble en tout cas avoir adoubé les NUTS, tandis que les États leur transfèrent de plus en plus de responsabilités. En 2009 par exemple, Madrid, Rome et Berlin ont décidé d’accroître l’autonomie financière et les prérogatives législatives des régions. Ainsi les Länder allemands captent-ils désormais 36 % des impôts directs collectés, l’État fédéral en captant près de 50 % et les communes se partageant le reste. L’année dernière, Athènes a pris part au mouvement en substituant à ses 54 départements 13 régions démocratiquement élues, dotées de nouvelles compétences. Enfin dans le reste de l’Europe, l’idée fait son chemin : la Bulgarie, la Roumanie et Chypres réfléchissent actuellement à la création de régions.
Mais les NUTS ne font pas l’unanimité. Elles souffrent en effet d’un déficit de légitimité, par exemple au Danemark où l’on envisage déjà la suppression des cinq régions créées en 2007. Nombre de projets de régionalisation ont été suspendus (Slovénie, Suède, Finlande, Irlande), voire annulés (Portugal, Lituanie, Lettonie). En Hongrie, plusieurs compétences (notamment les hôpitaux, l’action sociale et l’enseignement) ont même été recentralisées au dépend des comtés. Le chemin de la régionalisation est long et semé
d’embûches…
Et en France ? Si les régions ont été renforcées par la réforme constitutionnelle de 2003 et la loi organique de 2004, la dernière réforme territoriale a inversé la tendance. La part des recettes avec autonomie fiscale dans leur panier de ressources a chuté de 33 % à 12 % (contre 60 % en Suède, un record) selon l’Association des régions de France. Les exécutifs régionaux ont été déçus du précédent quinquennat et attendent beaucoup de la “décentralisation 3.0” promise par François Hollande. Estimant par la voix d’Alain Rousset, président de l’ARF, que “la décentralisation n’est pas d’abord affaire de technique, elle est affaire de culture et de volonté, de sens”, ils rêvent aujourd’hui de la naissance d’une “République des territoires”.